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Journée de la femme ou DES DROITS DES femmes ?

Le 8 mars, c'est une journée internationale de lutte pour les droits des femmes. La journée des droits des femmes, si on veut. La journée des femmes, à la limite. PAS la journée de LA femme.


Rooo, mais tu chipotes, là, la femme, les femmes, c'est pareil, tu joues sur les mots, même pas sur les mots, sur un singulier-pluriel, qu'est-ce que ça peut bien changer ?...



Hum, la première fois que j'ai entendu parler de la "journée de la femme" (au singulier, bien sûr), c'était au lycée, en cours d'histoire-géo. Ce n'était pas pour aborder le contexte ou les raisons de la création de cette journée. Dommage, ça aurait pu être intéressant (histoire-géo, culture générale, tout ça). Mais non, en fait, si j'ai appris l'existence de cette journée, c'est parce que cette année-là j'avais le plaisir de me coltiner un prof sexiste et misogyne qui a ouvert le cours avec une remarque... sexiste et misogyne. Quelque chose du genre "Aujourd'hui, elles n'ont pas fini de nous casser les c... (oui, un homme charmant je vous dis), c'est la journée de la femme !" Rires gras (et oui, en 1ère S, il y a beaucoup de garçons). "Heureusement, il nous reste 364 jours à être pénards pendant qu'elles font la vaisselle ! On est d'accord, c'est bien ce qu'elles font le mieux ! Enfin, il y a aussi... [je vous épargne les détails et la suite]" Re-rires gras. Je ne me rappelle plus des autres remarques qui ont émaillé l'heure qui a suivi, mais elles étaient probablement aussi nombreuses que pendant tous ses autres cours. Un jour, arrivée à saturation, j'ai voulu me faire l'avocat de la moitié de la population mondiale et j'ai argumenté de mon mieux mais je n'ai réussi qu'à diviser ma moyenne par deux pour le restant de l'année. Bref, puisque "la journée de la femme" ne semblait être que le lot de consolation devant nous permettre de supporter les 364 autres journées, je n'en voulais pas !


Bien plus tard, j'ai appris que cette journée avait en fait été créée en 1977 à l'initiative de l'ONU comme un temps international de manifestation et de lutte pour les droits des femmes. Waouh, quel scoop, ça valait peut-être le coup de s'y intéresser du coup.


D'accord, je m'y intéresse, mais c'est quoi le problème à dire "la femme" ?


D'une part, il n'y a pas "un" modèle de femme. Il n'y a pas de stéréotype, que des individualités. Et quand tu dis "la femme", moi je vois une passante dans un poème de Baudelaire, une silhouette douce et mystérieuse, pleine de promesses et de fantasmes. Ou alors je vois la femme caricature, la capricieuse, celle qui râle et dont on se plaint sans cesse entre hommes en riant grassement mais qu'il faut bien satisfaire un peu pour qu'elle nous satisfasse. Ou alors la femme dévouée, la mère, la sainte, la cuisinière, le sourire aux lèvres et les doigts râpeux sous ses gants de vaisselle. Mais je ne me vois pas moi ! Ni toi, ni elle, ni toutes les autres ! Pourquoi nous mettre toutes dans le(s) même(s) panier(s) ? Est-ce que nous sommes toutes faites dans le(s) même(s) moule(s) ? Est-ce que nous avons toutes les mêmes besoins ? Est-ce que nous sommes la masse indistincte de celles qui ne sont pas des hommes ? Non, non, et non.


D'autre part, à chaque fois que je lis journée de "la femme", "comme par hasard", il s'agit d'une opération promotionnelle pour des soins esthétiques, des soutifs, ou un encouragement pour les hommes à "prendre soin de nous" et à nous acheter des fleurs. WTF ? J'aime bien les fleurs, c'est pas la question. Mais ce serait pas un peu cliché, tout ça ? Ce serait pas un peu nous remettre gentiment, mais sûrement, dans notre petite case ? Du salon d'esthétique à l'évier pour la vaisselle, il n'y a qu'un pas, aurait dit mon prof d'histoire-géo.


Oui, mais c'est déjà faire quelque chose ! C'est déjà avoir une pensée pour les femmes, pour les mères, qui bossent dur, qui sont fatiguées, qui aiment bien se faire les ongles... On est un salon de coiffure, on ne peut rien faire de plus que vous offrir -10% sur la coupe + couleur... On est fleuriste, on ne peut rien faire d'autre qu'une petite promo pour que votre mari vous offre un joli bouquet... On est un magazine féminin, on est là pour vous vendre des paillettes, on va pas changer le monde...


Alors si vous ne pouvez rien faire de pertinent pour les droits des femmes, ne faites rien. Ne faites surtout pas de hors-sujet. Quand nos salaires seront égaux à ceux des hommes, nous nous offrirons volontiers des soins esthétiques et des coupes de cheveux à plein tarif. Quand la répartition des taches ménagères sera équitable dans les couples (sans même parler de la charge mentale), en particulier quand il y a des enfants, les femmes pourront s'offrir de la détente tous les jours et pas une fois par an. Quand, partout dans le monde, toutes les femmes auront acquis le droit à disposer librement de leur corps dans toutes les circonstances et à tous les moments de leur vie, on pourra trinquer le 8 mars entre copines le cœur léger. Et là je ne fais que survoler tout ça de très très haut, hein, j'en occulte les 3/4 et je ne fais même pas ma putain de féministe.


Alors, s'il vous plait, ne nous offrez pas de fleurs. C'est commercial, ça fane, et ça fait fête des mères. Et "la" femme qui meurt tous les 3 jours en France sous les coups de son compagnon en recevait souvent, elle-aussi. Alors question symbolique, on frôle le mauvais goût.

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