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Une doula pour la période post-natale ?

Quand on pense doula, si on est suffisamment bien informé pour ne pas penser “sorcière” (vous, dehors!), on pense souvent accouchement, ou même accouchement à domicile. Et, oui, on l’imagine bien, notre doula perchée, en extase dans cette ambiance blindée d’ocytocine, sa drogue préférée, faisant des sons graves en cœur avec la maman à la lueur des bougies… Si c'était si simple... La doula est là pour soutenir les femmes (et les mères... et les pères... et les grands-mères… bref), et si ça se résumait à une présence dégoulinante d’amour pendant quelques heures, si le moment de la naissance était le seul pendant lequel les femmes avaient besoin de soutien, ça se saurait.



Alors, l’accompagnement par une doula, ça commence avant, et ça finit après. Avant, ok. C’est la grossesse, normal. Mais, comment ça, après ? Après la délivrance, après la première tétée, après le départ de la sage-femme ou l’installation “en chambre” ? Oui, ça peut. Mais surtout le jour d’après, la semaine d’après, les mois d’après.


Alors, que fait-elle, la doula, dans cet après où, finalement, les angoisses de la grossesse sont derrière, la peur de la douleur aussi, le bébé-alien-mystère est maintenant un magnifique poupon-hyper-photogénique ? Il n’y a plus rien à faire, après, ou si peu. Vous voilà hors de la maternité, votre ordonnance pour la pilule en poche, une autre pour la rééducation du périnée, un rendez-vous pour un petit check-up 6 semaines plus tard. Et ciao ! Ces détails mis à part, vous n’avez plus besoin de personne. Vous n’êtes plus une bombe à retardement. Votre cas ne nécessite plus de surveillance mensuelle / hebdomadaire / quotidienne. Vous avez le droit de manger n’importe quoi, un steak cru, une salade pas lavée, du gras, sucré, salé, les spectres de la toxo, de l'hypertension, du diabète gesta ne planent plus au-dessus de votre tête. Votre poids n’intéresse plus personne. Vos états d’âme non plus. Vous étiez là pour faire un bébé. Mission accomplie, non? En plus il est en bonne santé. Pour la plupart des professionnels qui vous entourent, le contrat est rempli. Le pédiatre prendra le relais pour toutes les questions relatives à la santé de ce petit être, qui lui, maintenant, a vraiment besoin de beaucoup d’attention. Plus que vous, oui, évidemment...


Sauf que, parfois, c’est pas si facile de nourrir ce bébé. Des saletés de crevasses apparaissent juste après la sortie de la maternité, ou quand votre sage-femme prévoit de ne plus venir avant un petit moment, parce que “c’est lancé”. Bien sûr, vous pourriez appeler quelqu’un, mais c’est pas grand-chose, et ça va sûrement s’arranger, si toutes les femmes qui ont des crevasses commencent à appeler… Ça tombe bien, finalement, que la doula vous ait proposé de passer le lendemain. Et puis, à y regarder de plus près, elle vous redonnera les astuces pour bien positionner bébé, on vous en a parlé plein de fois, hein, mais comme ça, à tête reposée, calée dans la canapé, ça imprimera enfin.


Sauf que, parfois, l’accouchement n’est pas un événement qu’on peut classer aussi vite dans ses souvenirs. Parfois il faut y revenir. Parce qu’on a eu peur, parce qu’on a eu mal. Parce qu’on a cru qu’on allait y rester, parce qu’on n’a pas été si bien traitée. Ou parce que cette fois, “c’était le dernier” et que ça nous file un sacré bourdon, de ne plus jamais vivre ça, des premières bulles dans le ventre à la magie de la naissance. On en a parlé aux copines, mais elles changent de sujet, ou lèvent les yeux au ciel. Encore tellement de choses à dire, à sortir, à pleurer ou à s’émerveiller… Heureusement, la doula vient demain, et elle, elle ne se lasse jamais d'écouter.


Parfois, un bébé c’est un tsunami pire qu’une grossesse. Et ça, on ne s’y attendait pas. Bah ouais, nos grands-mères ont géré sans sourciller… Nos mères aussi… Nous, on était au taquet tous les deux, on a lu des livres, j’ai discuté avec des copines mamans, lui avec des papas, on a prévu tout ce qu’on voulait faire et pas faire… Et là, à peine deux semaines et on est au fond du gouffre. Le bébé n’a rien à voir avec les différents modèles des livres. Mon mec fait de son mieux mais ça sert à rien. Moi je galère H24 et je suis toujours pas capable de dire si mon allaitement se passe bien, si le lien avec mon bébé s’instaure normalement (il pleure n’importe comment ! vas décoder ça, toi !), si je fais ce qu’il faut au bon moment ou si je suis une bille. J’espère que ma doula saura me rassurer.


Parfois, on est fatiguée et on rêve de manger chaud en parlant d’autre chose que du bébé avec un adulte sympa qui regardera autre chose que la pile de vaisselle sale ou le lait caillé sur notre épaule. Et peut-être même qu’à la fin du repas cet adulte vraiment très sympa se lèvera spontanément pour faire la vaisselle pendant qu'on ira s’allonger un moment avec le bébé. Ouf, la doula, c’est ce genre d’adulte-là.


Parfois, ce bébé n’est pas le premier. Il bouscule toute une fratrie, toute une routine bien huilée. L’ex-petite dernière qui rêvait tant de ce petit frère se réveille toute la nuit et se roule par terre toute la journée. L’aîné s’isole et envoie balader tout le monde, ambiance. Et ça commence à être tendu avec le papa, qui ne comprend pas pourquoi c’est à lui de ranger les jouets étalés dans tout le salon en rentrant du boulot. Alors l’envie de hurler et d’envoyer balader tout ce petit monde vient s’échouer en un sanglot strident sur l’épaule de la doula. Et ça va mieux.


Parfois, la reprise du travail avant les 3 mois du bébé est une véritable torture mentale, et il ne faut rien moins qu’une doula pour surmonter ça. Et parfois, avoir pris un congé parental te semble soudain le choix le plus stupide et inconséquent de ta vie entière : à qui l’avouer sans culpabilité, à part à ta doula?


Alors, c’est vrai que, médicalement parlant, il ne se passe rien, ou presque, passées ces heures intenses de la naissance et du post-partum immédiat. Mais humainement, il se passe à peu près un milliard de trucs cruciaux. Comme (re)devenir parent, (re)mettre son corps à disposition de son bébé jour et nuit, se poser des questions sur ce qu’on fait bien ou pas, pourquoi, comment, à quelle heure donner ou ne pas donner la vitamine D, changer la couche avant ou après la tétée ? Comme se sentir impuissant.e et inutile, et la seconde d’après, frôler l’état de grâce parce que le bébé s’est endormi dans la position la plus mignonne du monde. Comme culpabiliser de ne plus être très disponible pour l’aîné.e. Comme se sentir débordé.e, avoir besoin d’une paire de bras supplémentaire, de dormir, de parler. Comme se demander comment on a pu vivre tout ce temps sans ce petit bout d’amour, comment on va pouvoir survivre maintenant avec ce petit bout de nerfs qui hurle en se tortillant. Comme tous ces autres trucs qui se passent.


Alors, la prochaine fois que vous penserez doula, imaginez-là plutôt en train de donner un coup de main dans la maison apocalyptique d’une famille qui vient de s’agrandir, d’accueillir les pleurs d’une femme à bout pendant que son bébé dort comme un bienheureux pour au moins 4 minutes, de jouer un peu par terre avec l’aîné.e dont le besoin d’attention est devenu insondable. Parce que la doula soutient la femme dans toutes les situations de la vraie vie...

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